Le street-artiste français Invader poursuit sa conquête de l’espace urbain
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30
May
Le street-artiste français Invader poursuit sa conquête de l’espace urbain
30.5.2021
Le street-artiste français Invader poursuit sa conquête de l’espace urbain
Depuis plus de vingt ans, un mystérieux street-artiste français habille inlassablement les murs de mosaïques caractéristiques. Vous avez certainement déjà croisé l’une de ses œuvres. Sa marque de fabrique ? Les Space Invaders, de petits aliens pixelisés parsemés aux quatre coins des villes et du globe. Focus sur Invader, un artiste résolument contemporain qui a su bâtir un empire.
Invader, un Artiste Vivant Non Identifié
À la fois discret et sur médiatisé, transgressif et coté, vintage et moderne, Invader crée des ponts inattendus entre des pôles radicalement opposés.
« Je me définis comme un AVNI, un Artiste Vivant Non Identifié. J’ai choisi Invader comme pseudonyme et j’apparais toujours masqué. Je peux ainsi me rendre à mes propres expositions sans que les visiteurs ne soupçonnent mon identité ni ne remarquent ma présence, même si je me trouve à quelques pas. Depuis 1998, j’ai développé un projet d’envergure. Son nom de code : Space Invaders. »
Voici ce que l’on peut lire sur lesite officiel du street artiste. Le ton est donné ! Cette auto-description réalisée par Invader lui-même le nimbe plus de mystère qu’il n’éclaire ses lecteurs. Bien avant l’avènement du masque chirurgical, l’artiste avait recours au camouflage de son visage pour préserver son anonymat. Les seuls indices à notre disposition sont sa date de naissance, 1969, sa nationalité, française, et son cursus académique, les Beaux-arts de Paris et la Sorbonne. Au jeu du « Qui suis-je ?», Invader gagne le point.
Projet Space Invader, quand le street-art colonise les villes
Invader joue de son anonymat pour susciter la curiosité, titiller l’imaginaire. Tel un super-héros du street-art, il arpente les rues à la nuit tombée pour semer ses créatures pixelisées et réaliser son « acupuncture urbaine ». Pour le grand public, Invader est surtout un artiste de rue français spécialisé dans la mosaïque, à l’origine de l’un des projets de street-art les plus célèbres au monde.
Projet d’une vie, la série de mosaïques baptisée Space Invaders souffle en 2021 sa vingt-troisième bougie. Directement inspiré du jeu-vidéo éponyme de 1978, Invader a simplement trouvé en cet alias une définition parfaite de son travail : l’invasion de l’espace. Il « aime à considérer ce travail comme un projet à l’échelle mondiale dans laquelle les notions de l’infiniment petit et de l’infiniment grand sont en confrontation constante».
Subtilement intégrées dans le décor urbain, les petits carreaux de faïence de Space Invaders ont colonisé toutes les grandes métropoles mondiales, de la tour Eiffel à NewYork, en passant par Mombasa ou Katmandou. Il en existe aujourd’hui la quantité colossale de 3997 exemplaires, parsemés dans 79 villes, dont 1465 se trouvent à Paris. Rien n’est laissé au hasard, chacun de ces points névralgiques a été minutieusement étudié et choisi par l’artiste.
Invader a fait de la planète son terrain de jeu
Celui qui se définit avant tout comme habitant de la Terre a même investi les profondeurs sous-marines avec les sculptures de Jason de Caires Taylor mais aussi l’espace, en devenant notamment le premier artiste à installer une œuvre à bord de la Station Spatiale Internationale. Invader, hacker de l’espace public, a lancé avec Space Invaders un virus artistique qui n’est pas près de stopper sa pandémie.
Sa philosophie ? “N’importe quand, n’importe où”. Avec discrétion et précision, Invader réalise un véritable travail de fourmi. Il constitue la plus grande base de données d’œuvres jamais créées par un seul street-artiste. Depuis, des individus isolés tentent de prendre la relève et de perpétuer ce mouvement initié par Invader. Contagion réussie.
En 2020, l’artiste a installé sa base au MAMO, centre d’art situé sur le toit de la Cité radieuse de Le Corbusier à Marseille. Sa dernière opération est lancée en 2021 dans la capitale slovène de Ljubljana avec en prime une nouvelle exposition au musée MGLC.
En clin d’œil au symbole de la ville, il a choisi comme motif le dragon pour certaine de ses créations.
Il est désormais possible de découvrir ses 22 nouvelles mosaïques, en addition aux 20 déjà présentes. Vous voulez partir à leur conquête ? Les artistes de Street Designersvous guident volontiers dans le dédale urbain des villes de France et du monde. Lors d’un street-art tour, vous irez à la découverte des œuvres les mieux dissimulées.
Invader, de l’illégalité aux sommets des enchères
Pour Invader, « le but est avant tout de libérer l’art des aliénations que peuvent constituer, habituellement, les musées ou les institutions. » Un art engagé, donc ? Pas vraiment, selon l’artiste. Il ne se considère pas comme ouvertement politique, bien qu’il pratique ses installations «illégalement à 99% ».
Si son objectif est avant tout de rendre l’art accessible à tous dans les rues, de créer la surprise et l’étonnement esthétique, Invader n’a pu échapper au système du marché de l’art. Au fil des ans, il a gagné en popularité jusqu’à devenir l’un des artistes les plus côtés des maisons de vente aux enchères, à l’instar de son ami anglais Banksy.
Il multiplie finalement les expositions dans les musées et les galeries. Un art récupéré ou infiltré ? Nous en sommes les seuls juges. Quant à lui, Invader ne peut que se réjouir de pouvoir admirer l’expansion de son Pixel Art au sommet de le Tour Eiffelcomme sur le costard de Jacques Chirac.
Premier artiste à être exposé au musée du Louvre de son vivant, Invader écrit également l’histoire de l’art. Au-delà des Space Invaders, dont il garde le motif pixelisé, il réinterprète de grandes œuvres comme La Joconde. Un nouveau courant artistique est né : le Rubik cubisme, un savant mélange entre le fameux casse-tête et le cubisme. Sa Joconde a été vendue aux enchères à 480 200 euros en février 2020.
Vol et vandalisme, la rançon du succès
Loin de la protection des institutions, les œuvres urbaines souffrent des aléas du monde extérieur et de la convoitise. Invader a vu certaines de ses mosaïques vandalisées, mais aussi dérobées pour être revendues. Au grand dam des voleurs, il est impossible de décoller les œuvres d’Invader sans les détruire. Les tentatives de répliques sont donc rapidement évincées par la preuve de leur non-authenticité.
Difficile toutefois de garantir leur longévité dans la jungle urbaine. Les « réactivateurs »s’attèlent à donner une nouvelle vie aux mosaïques détériorées. C’est ainsi qu’un groupe de volontaires a restauré la fresque PA_689 à Belleville. Les créatures numériques, initialement prédatrices dans le jeu-vidéo, sont désormais des proies chassées.Tandis que certains esprits sont mal intentionnés, d’autres les poursuivent par admiration.
Une chasse au trésor avec l’application Flash Invaders
Invader, en influenceur de l’ombre, a constitué une immense database d’œuvres référencées, mais aussi fondé une communauté. L’application mobile dédiée au projet met en relation les mondes virtuels et réels pour donner lieu à une chasse au trésor planétaire.
À l’origine, il s’agissait pour lui de « libérer les Space Invaders de leurs écrans de jeu et de les amener dans notre monde physique ». Finalement, ces derniers ont repris la direction des écrans du 21ème siècle, les smartphones. Les fans peuvent flasher les œuvres avec leur téléphone pour les collectionner. Chaque mosaïque à un numéro de série et un nombre de point associé.
L'application FlashInvader à été lancée en 2014. En flashant les œuvres dotées de 10 à 100 points, chaque participant peut augmenter son score dans le classement mondial de « chasseur ». Ludique, interactif et numérique, le projet évolue avec son temps.
Entre art, technologie et psychologie des foules, l’œuvre d’Invader se joue des codes pour bâtir un empire unique en son genre. Une « World Invasion » 2.0.
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